trop tard pour rêver de Monaco
Les députés belges ont ajourné mardi de six mois leur décision sur la demande de nationalité belge du chanteur français Johnny Hallyday, un report qui risque d'anéantir ses espoirs supposés de s'installer dans le paradis fiscal de Monaco.
Les 17 membres de la Commission des naturalisations de la Chambre des représentants, qui auraient pu accepter ou rejeter la demande du "chanteur préféré des Français", ont préféré reporter à l'automne le moment de trancher dans ce dossier hyper-médiatisé et polémique.
Le député Olivier Maingain a expliqué ce report par la nécessité de "mettre à jour" le dossier du chanteur, qui a notamment changé de domicile depuis que le dossier a été déposé.
Mais le président de la commission des naturalisations, le libéral flamand Guy Hove, a souligné que les députés voulaient également examiner la "sincérité" des sentiments de Johnny Hallyday vis-à-vis de la Belgique.
"Il y a des éléments, notamment fiscaux, qui ont été rapportés par la presse et que nous voulons vérifier", a expliqué M. Hove.
"Johnny Hallyday maintient (sa demande de naturalisation) et reste confiant dans la décision de la commission, compte tenu de la sincérité de ses motivations", a réagi le chanteur dans un communiqué après l'annonce de la décision des députés belges.
Depuis plusieurs mois, des journaux suggèrent que Johnny, qui s'est récemment installé avec sa famille dans la station de ski huppée de Gstaad (Suisse) pour payer moins d'impôts qu'en France, souhaiterait en fait devenir belge pour ensuite vivre à Monaco, où les citoyens belges jouissent d'avantages fiscaux dont ne bénéficient pas les Français.
Même si l'interprète du "Pénitencier" et de "Noir c'est noir" a, lui, démenti formellement vouloir s'intaller sur le "Rocher", la gauche française et le parti centriste UDF ont, en pleine campagne présidentielle, taxé de manque de civisme la vedette, qui soutient ouvertement le candidat de la droite Nicolas Sarkozy.
Quoi qu'il en soit, ce délai supplémentaire remet en cause son éventuel départ à Monaco.
En effet, s'il avait obtenu la nationalité belge mardi, Johnny aurait automatiquement été déchu de sa nationalité française en vertu d'une convention du Conseil de l'Europe de 1963 ratifiée par la France et la Belgique.
Mais la situation juridique devrait changer dans les prochaines semaines, la Belgique ayant décidé de "dénoncer" cette convention.
Sauf décision contraire de la France, s'il devient finalement belge cet automne, Johnny devrait donc conserver sa nationalité française.
Sauf si Johnny demandait lui-même à être déchu de la nationalité française, il aurait donc la double nationalité, ce qui n'arrangerait pas le chanteur si son but --ou celui de ses conseillers fiscaux-- était de profiter des largesses fiscales monégasques.
Polémique fiscale mise à part, Johnny représente de toutes façons un cas tangent au regard de la loi belge: pour devenir citoyen du Royaume, il faut en principe avoir sa résidence principale dans le pays depuis au moins trois ans --ce que Johnny n'a pas-- ou, à défaut, être en mesure de prouver d'autres "attaches véritables avec la Belgique".
Une exigence à laquelle Johnny Hallyday, de son vrai nom Jean-Philippe Smet, né le 15 juin 1943 à Paris d'une mère française et d'un père belge avec lequel il était brouillé, répond en affirmant qu'il s'agit du pays de ses "racines".
"La législation prévoit également d'accorder la nationalité aux personnes qui rehaussent le prestige du pays par leur activité, par exemple scientifique, artistique ou sportive", a expliqué à l'AFP le député socialiste Mohammed Boukourna.